Au cours des dernières années, le segment de l’affichage et de la signalétique a connu des hauts et des bas. Avec la crise sanitaire, les acteurs de ce marché ont montré leur agilité. Mais comment rebondir alors que la bulle « Covid » se résorbe ?

A la fin de l’année 2020, Le Papetier de France était allé à la rencontre des professionnels de la signalétique et de l’affichage pour recueillir leur ressenti sur la progression spectaculaire de leurs ventes. En effet, à l’époque, ce marché historiquement stable connaissait un boom inédit. Avec les mesures sanitaires mises en place pour lutter contre la pandémie, la demande était non seulement forte (tous les types d’entreprises privées ou publiques ont dû se doter de solutions signalétiques), mais aussi soudaine (elles n’ont eu que quelques jours ou semaines pour s’équiper) que variée (affichages muraux pour les gestes barrières, marquages au sol pour la distanciation, etc.). « L’affichage Covid a fait décoller cette catégorie. Nous avions déjà la gamme Take Care, qui s’adressait principalement à l’industrie. En 2020, nous avons développé de nouvelles signalétiques pour le distanciel, les sens de circulation, le lavage des mains, le port du masque, etc. Comme nous avions des machines d’impression en interne, nous avons pu réagir très rapidement, et les ventes ont explosé à ce moment-là ! », se remémore Charlène Soulier, responsable communication et trade marketing chez CEP Office Solutions. Face à ces besoins importants, fabricants et revendeurs ont rapidement étoffé leurs référencements en la matière. Mais plus de deux ans plus tard, que sont devenues ces offres ? Quant à la demande, comment a-t-elle évolué avec la situation sanitaire ?

Des références qui déclinent

En ce qui concerne les volumes en signalétique dite « Covid », la profession est unanime : après une année 2020 au sommet, 2021 a vu la demande décliner (surtout au deuxième semestre), et 2022 a signé la fin de la bulle pandémique pour le secteur de l’affichage. « Forcément, en 2020, la gamme a été à son top. 2021 était une bonne année car de nombreuses mesures sanitaires étaient encore en vigueur, mais nous voyions déjà certains produits ralentir. Finalement, aujourd’hui, nous conservons des affiches pour le port du masque et quelques signalisations au sol, mais c’est une version très réduite de l’offre initiale », indique Julien Soullard, senior product manager chez Avery, qui a recentré son activité sur son cœur de métier, l’étiquetage. « Certes nous avons eu une grosse demande sur les signalétiques Covid, mais les ventes se sont ensuite essoufflées avec la levée des mesures sanitaires », constate également Noémie Fougerouse, cheffe de produits en charge de l’affichage et de la signalétique chez JPG. « 2021 a été une année de transition. Avec l’assouplissement des restrictions, nous avons observé un net ralentissement des ventes de signalétique Covid. Puis en 2022, les gammes se sont écroulées car les gestes barrières ont été progressivement abandonnés et la demande s’est tarie car les services publics et les entreprises étaient équipés », explique Benjamin Baruteaud, directeur marketing du groupe T3L. Un deuxième facteur responsable de la baisse de la demande est effectivement le taux d’équipement des lieux accueillant du public. Charlène Soulier (CEP Office Solutions) souligne que « le choix d’un affichage de haute qualité, avec des adhésifs et matériaux résistants, permet aux entreprises d’espacer au maximum le renouvellement de leur signalétique. »

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L’industrie redevient le premier client du marché de la signalétique, notamment pour des affichages relatifs à la sécurité. ©CEP Office Solutions
L’industrie redevient le premier client du marché de la signalétique, notamment pour des affichages relatifs à la sécurité.

Retour au marché pré-Covid

Le recul des ventes de ces références marque le retour d’une clientèle plus traditionnelle pour le secteur, l’industrie. « Nous vendons toujours de l’affichage Covid comme des affiches A4 gestes barrières, notamment dans la gamme scolaire ; mais la demande est principalement revenue du côté des entreprises et de l’industrie pour une signalétique axée sur la sécurité des collaborateurs en interne, comme des stickers de sorties de secours, d’extincteurs, etc. », précise Charlène Soulier. Usines, entrepôts logistiques, laboratoires… « L’industrie reste le marché qui soutient cette famille de produits. Même si les sites de production sont de plus en plus automatisés, ils utilisent de la signalétique. Je suis optimiste vis-à-vis d’une nouvelle donne où l’affichage physique viendra appuyer le digital », analyse Benjamin Baruteaud (T3L). Selon Noémie Fougerouse chez JPG, « en plus de la clientèle industrielle historique, des entreprises qui n’avaient pas l’habitude d’afficher des informations le font désormais… La pandémie a quand-même laissé des traces ! ». Pour répondre aux besoins de ces différents types de professionnels, l’offre est extrêmement étendue, des bandes au sol pour délimiter un espace aux panonceaux indiquant une zone particulière (salle de pause, sanitaires, etc.), des tableaux et vitrines pour afficher des informations réglementaires aux supports sur pieds mobiles, et bien d’autres. Ces solutions doivent se montrer aussi fonctionnelles que solides lorsqu’elles sont destinées à rester dehors, ou qu’esthétiques lorsqu’elles sont déployées dans des bureaux. Chez Durable par exemple, les classiques sont revenus sur le devant de la scène avec « les cadres Duraframe qui progressent tous les ans. Nous avons également étendu notre offre en affichage intérieur avec des pochettes vitro-statiques très simples d’utilisation, avec un prix attractif. Pour un usage en extérieur, nous proposons aussi des pochettes étanches qui sont particulièrement sollicitées par les mairies, les parcs de loisirs, le secteur de la construction, etc. », détaille Virginie Capart, marketing manager de la filiale française.

La qualité plébiscitée

Que ce soit pour un usage industriel ou tertiaire, les critères de choix dans l’affichage et la signalétique sont en ligne avec les tendances sociétales observées ces dernières années. Pour Benjamin Baruteaud, « l’aire de la surconsommation est terminée. Les clients regardent plutôt les références qui vont durer dans le temps. Ils font aussi attention aux valeurs environnementales et sociales de leurs fournisseurs (les distributeurs sont de plus en plus exigeants sur ce volet de la responsabilité). Nous allons vers moins de volumes mais plus de qualité. » Un point de vue que Virginie Capart partage : « Les utilisateurs recherchent une durée de vie et une fabrication locale ou européenne (Durable dispose de quatre usines en Europe dont deux en Allemagne). De plus, avec la réglementation sur les achats publics (l’obligation d’acheter une certaine proportion de produits issus du réemploi ou à base de matériaux recyclés), nos revendeurs partenaires ont des objectifs forts en termes de RSE et d’environnement. C’est pour cela que nous adaptons nos gammes. » Même si le prix compte, les arguments en faveur de la qualité, de l’environnement et de la fabrication locale semblent séduire davantage dans ce secteur que dans d’autres familles de produits. « Les acheteurs se tournent vers des articles plus respectueux de l’environnement, vers le fabriqué en France (CEP dispose du label Origine France Garantie). Par ailleurs, les entreprises font souvent le choix de payer plus pour un produit de meilleure qualité car la sécurité au travail est primordiale », témoigne Charlène Soulier. Chez JPG, Noémie Fougerouse remarque aussi que « les clients veulent acheter mieux et surtout plus durable. Ils sont d’ailleurs prêts à mettre plus cher pour ne pas avoir à renouveler leur équipement trop souvent ». Elle note néanmoins une appétence grandissante pour « des solutions polyvalentes, avec un affichage mobile ou mixant les médias ». Une piste de réflexion intéressante pour les spécialistes de ces supports.

Malgré l’érosion des ventes des gammes développées pendant la pandémie, le marché de la signalétique et de l’affichage a encore plusieurs cordes à son arc, à condition de continuer à concevoir des produits qui répondent aux besoins très spécifiques des diverses organisations professionnelles. Un dernier enjeu est de réussir à faire connaitre l’offre disponible. « Ce marché a de l’avenir grâce à une proposition riche en solutions qualitatives. Cependant, les marques doivent plus communiquer sur leur savoir-faire. Produire ces références est une chose, mais je pense qu’il faut vulgariser les catalogues afin que les acheteurs prennent conscience de la variété de l’offre », conclut Noémie Fougerouse pour JPG.

 

 

Signalétique sur-mesure : un investissement sur le long terme

 

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De la petite signalétique aux solutions sur-mesure, certaines entreprises font de la production une activité à part entière. Pour ce faire, des investissements sont nécessaires, explique Jean-Luc Mora, dirigeant du Groupe MTM, qui a une division « Prod & Com ».

Comment avez-vous développé la production de signalétique ?

MTM a trois univers : le plus important est la fourniture et le mobilier de bureau ; le deuxième est la vente de moteurs d’impression Toshiba ; et pour terminer, Prod & Com. Cette activité de production et communication est une mutation d’un ancien métier : le tirage de plans. Avec la dématérialisation, les tirages ont chuté, or les fabricants de matériel faisaient aussi des machines pour l’impression d’affiches et de signalétiques. Nous nous sommes dit « Pourquoi pas ? ». Nous avons commencé avec des adhésifs et des panneaux. Progressivement, nous nous sommes fait une place sur ce marché, puis nous sommes arrivés assez naturellement à la communication.

Que représente cette activité pour vous ?

Aujourd’hui, environ 690 000 euros de chiffres d’affaires, avec une équipe de huit personnes. Dans ce métier, il est essentiel d’avoir une chaine d’experts pour la vente, la création, l’impression et la découpe, la fabrication et la pose. Chaque étape nécessite des compétences particulières pour proposer la bonne solution, conçue avec les bons matériaux, et installée correctement. Il n’y a pas de chantier standard ! C’est passionnant car ce n’est jamais pareil, mais l’investissement est important par rapport au revenu généré.

Justement, quels seraient vos conseils pour vos confrères papetiers ?

Si vous souhaitez vous mettre à la production de signalétique, il faut accepter que c’est un métier haute couture ! Recruter une équipe de spécialistes capables de maitriser les outils peut prendre plusieurs années, surtout avec les difficultés de recrutement actuelles. Se faire connaître pour ce savoir-faire prend aussi du temps, il faut donc avoir les moyens d’accompagner la mise en place de cette activité dans son organisation. Il faut être prudent en étant conscient de ces contraintes.

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